Micmac boulanger

14 mai 2014

— Dis, Papistasse, S’anonn, è’ veut pas me rendre ma Tête…
Le Papistache marque un temps de suspension avant de retomber sur terre — en l’occurrence devant le portail de l’école où il est passé prendre livraison d’un bambin à ses soins confié.
— Ta tête ?
Interrogation qui dénote un ralentissement des fonctions cérébrales du dit vieillard qu’on avait connu plus inventif, mais que voulez-vous ? le poisson coute cher !
— Ma Tête Brûlée, Papistasse !
Mais dis-nous, ami chroniqueur, tu omets l’accent circonflexe à « coute » et tu le poses sur le « u » de « Brûlée » ? Oui !

De l’explication légèrement conflictuelle qui suit et que j’épargne au lecteur, il ressort que Shannon a sucé jusqu’à la moelle le bonbon émoustillant au doux nom évocateur de sensations interdites.

Réclame

« Le plus fort des bonbons qui piquent ! De ceux qui font friser la langue, retournent les papilles, réveillent pour de bon les sensations ! Y’a pas plus acide ! » hurle la publicité à la vitrine de Madame Patapin, « un bonbon qui pétille, ça fuse, ça remonte le long du dos, ça te secoue les neurones. Et c’est ça qui est bon ! C’est normal : les Têtes Brûlées sont les bonbons les plus acides du marché. »

Fin diplomate, le Papistache tranche :
— Perrine, tu l'avais donnée, cette Tête Brûlée, à ta camarade or tu n'ignores point que l'adage serine que donner c'est donner et reprendre c'est voler.
Là, le vieil homme au vocabulaire un brin suranné et à la morale désuète — on ne dira rien de l'adéquation de sa langue à l'âge supposé des enfants embrouillés dans ce micmac boulanger — s'attend à ce que fuse une répartie du style : « C’est pas ma copine d’abord ! » mais les ressources enfantines sont insondables. Lisons la suite.
— Nan, je lui avais prêtée !
L’ancêtre est scié ! Il tombe. Rideau !