Thé MCLXXVI
Je tiens tout d'abord à vous rassurer.
Je vais bien,
je ne suis pas fou,
le Horla n'habite pas la maison jaune,
mais...
Depuis quelques temps, j'ai constaté — et Épouse-Que-La-bougeotte-Reprend confirme — je suis victime, sinon d'hallucinations, du moins d'évènements étranges à la limite d'une des multiples formes recensées de la kinésie (pour autant que ce soit bien à ce mot que ma pensée renvoie).
Voici :
- Nul n'ignore plus désormais que mon bureau siège à l'étage (j'ai vue sur la boite aux lettres depuis le fenestron à oscillo-battant) ;
- Nul — non plus — ne peut nier avoir eu connaissance que la cuisine se trouvait au rez-de-chaussée ;
- Nul — encore, mais c'est bientôt terminé — ne saurait — même sous la torture — avouer que je ne l'ai pas entretenu de ma relation particulière avec l'infusion de camellia Sinensis.
J'en viens au fait (« aux faits » devrais-je écrire)...
J'en viens aux faits :
Depuis quelques temps, j'ai constaté que — et ce quasiment de manière systématique, disons dans 99% des cas — à chaque fois — 99% des cas— que je monte l'escalier avec un bol, un verre, une tasse ou tout autre récipient de même ordre — mug, jatte, saladier (saladier ? non, pas saladier), éprouvette, timbale, gobelet, quart, chope, godet, coupe, hanap, flûte, bock et autres— PLEIN, eh bien, croyez-moi ou non, mais dans les minutes ou les heures qui suivent, je suis consterné de dévoiler que le dit récipient est rigoureusement VIDE à la descente de l'escalier ! VIDE !
Et attention ! Le contraire ne s'est JAMAIS produit. JAMAIS !
Je ne suis pas paranoïaque, mais épris des sciences — modeste amour mais sincère — rationnelles et j'aime comprendre, et là, force m'est de baisser les yeux : je ne comprends pas.