Impudiques confessions
— Hello ! Comment ça va ?
Aïe, aïe, aïe ! Déjà une question existentielle de bon matin. Moi, peinard, les mains dans les poches — ça va de pair— la casquette — la casquette ! pas un béret ! ! ! comme j’ai entendu, hier, de la bouche de ces garnements qui venaient pleurer des bonbons à la mort-aux-rats — enfoncée sur les yeux, le pas vif et les yeux dans le vague, je me croyais absous de toute sollicitation intellectuelle — acheter le pain ne requiert pas la mobilisation de toutes mes facultés ; la caisse enregistreuse calcule la monnaie à rendre ! et j’ai toujours l’appoint ! ! — et voilà mon voisin — au bout de la rue Léon, tournez à gauche, c’est la maison avec les nains et le moulin en faux bois sur la pelouse, vous ne pouvez pas vous tromper. Comment ? La rue Léon a deux bouts ? Oui, elle a deux bouts, mais je ne la prends que dans le sens de la circulation obligatoire. Alors, vous sortez par le portail (oui, le portillon est fermé à clé), vous vous engouffrez dans le sens de circulation, puis à gauche, comme j’ai écrit tout à l’heure — qui , en verve ce dimanche, chahute mes neurones.
— Hello, comment ça va ?
Moi, mise à part la terrible « Qu’est-ce que tu prends comme dessert ? » je ne connais pas de question plus difficile à cerner que celle-ci. Mais, attendez ! J’ai la parade. Je ne suis pas né de la dernière pluie de petites pâtes et la seule "chavanne" que j’aie connue, c’était la côte du même nom en sortant de Lèves pour rejoindre le plateau de la Beauce, et ce n’étaient pas des Spaghettis ni des Macaronis mes compagnons de randonnée cycliste, on pédalait entre Français ce jour-là. J’ai la parade.
— Salut, et toi ?
Vous avez vu le retour de coup droit. Gagnant. Le nanophile*, ça le scotche sur sa ligne de fond de court. Le temps qu’il trouve une réponse, j’ai déjà obliqué à gauche sur la rue du Lieutenant-qu’est-mort-à-la-guerre. On n’apprend pas à un vieux solitaire comment éviter les épanchements intimes sur le tarmac des trottoirs de sa ville d’adoption.
— Sinon, vous, ça va ?
* Les puristes écrivent "nanomane", mais où voyez-vous des puristes ici ?