Aléatoire rime-t-il avec échappatoire ? Pas sûr, pas sûr !
Terrassé, le Papistache pique du nez devant son écran. Il s’éveille, ses lunettes sont tordues. A pas lourds, il se rend vers le robinet du lavabo de la salle de bains — oh, là, là que de “d”— les touches du clavier ont laissé leur empreinte sur sa joue droite. Il a dû dormir longtemps. Il se sert un verre d’eau et le recrache... sa joue gauche porte également la marque des touches du clavier. Il a bougé pendant son sommeil !
Non, mais, vous avez lu : Le Papistache a bougé pendant son sommeil !
Quoi ?
C’est tout l’effet que cela vous procure ?
Bouger ? Sommeil ?
Non ?
Rien ?
Papistache a bougé pendant qu’il dormait, appuyé sur son clavier.
Oui ?
Vous ne trouvez que ce rire épais à lui lancer au visage.
Cherchez un peu !
En - dormant - il - a - appuyé - de - façon - aléatoire - sur - les - touches - de - son - clavier !
Et ?
Et ?
Et, vous ne mourez pas d’envie de lire le texte dont son sommeil a accouché ?
Oooooh ! Mais si qu’ils en meurent d’envie, mais ils ont leur fierté et demander leur dépiauterait la bouche, alors ils attendent que tu le leur livres toi-même ton texte aléatoire.
Oui ? Val ?
Vous voudriez poser une question ? Allez-y !
Comment ? Que je (j’abandonne la 3e pers. du sing.) vais trouver une pirouette ( je ne sais jamais le sexe d’échappatoire, alors je ne l’emploie pas ) pour éviter, in fine, de vous donner à lire un texte qui n’a jamais vu le jour.
Alors, Val, c’est mal me connaître !
Quoi ?
Je prétendrais que ce texte serait si unique, si merveilleux, si novateur, si éthéré... que je ne pourrais le publier sous peine de mettre à feu et à sang la communauté littéraire mondiale.
Ttttt, tttt, tttt !
J’aurais pu, autrefois, pirouetter en publiant une ineptie absconse et vous laisser croire que, seul, je serais apte à y lire les prémisses du poème du XXIe siècle.
J’aurais pu vous imposer l’idée qu’aucun traitement de textes n’était activé au moment de mon endormissement souverain. J’aurais menti. Le traitement de textes est toujours activé au moment où je m’agenouille sur mon prie-dieu.
J’aurais pu vous pondre un joyeux délire rempli d’allitérations que j’aurais fait passer pour mon œuvre “boronalinesque”.
J’aurais pu vous demander de l’argent pour vous vendre ce chef d’œuvre.
J’aurais pu prétexter que Mamoune, me croyant à la salle de bains à mes ablutions du soir, aurait, fortuitement, éteint l’appareil et m’aurait foudroyé en bâillant :
— Quand l’ordinateur demande “Voulez-vous enregistrer les modifications ? je clique sur non, hum ? C’est bien ce que tu me dis à chaque fois ?
J’aurais pu élucubrer que, revenu face à l’écran, après avoir redressé mes lunettes et surpris de la couche de poussière accumulée sur la vitre, j’aurais, d’un seul mouvement, effacé et les postillons et le texte imprimé sur la page virtuelle. J’aurais pu.
J’aurais pu dire que c’était mauvais et vous m’auriez cru.
J’aurais pu vous laissez accroire que je ne me serais pas aperçu du rapport de cause à effet entre les marques, mon sommeil et l’éventuelle production d’un texte. J’aurais pu.
J’aurais pu ne rien vous dire !
Non, je ne me débinerai pas. Je peux vous donner à lire le texte que mes joues, mon nez et mes oreilles ont imprimé ce soir au cours de ce sommeil si paradoxal.
Vous avez entendu : Il peut le faire.
Il peut le faire, c’est extraordinaire !